Difficile chantier que de brosser le portrait d'un des meilleurs films du chantre du cinéma indépendant américain, Jim Jarmusch. Impossible d'édifier avec certitude une peinture révélant précisément les traits du maître, car oui maîtrise il y a.
Suite à l'excellent dead man, western crépusculaire avec Johnny Depp (peut-être l'objet d'un futur article), Jarmush en plein paroxysme créatif enchaîne en 1999 avec Ghost Dog : the way of the samuraï dans lequel il esquisse la vie d'un tueur à gages consciencieux et précis au service de la pègre, et dont la pensée est ponctuée par le hagakuré, ancien code samuraï du XVIIème.
La véritable force du film est de réussir à imbriquer des formes circulaires dans des formes rectangulaires, de fusionner les genres et de les hybrider afin d'obtenir justement un nouveau genre. Ainsi on retrouvera différentes sources d'inspiration hétéroclites concentrées en un seul point balayant à la fois le film de samouraï, le western, les films de gangster, les cartoons sans aucune hiérarchie.
En effet ce long métrage imprégné de prose désenchantée ne se soucie guerre de la cohérence de l'histoire ou de la rigueur des jointures.
Mais il réussit à unir dans un entrelacement effreiné la parodie, au travers du regard ironique porté sur les "coutumes" quasi ethniques des petits mafiosos italiens, le western avec un duel final digne des plus grands classiques du genre, les dessins animés présents de façon latente tout au long du film.
Les noces fécondes entre le déplacé et le non codifié donnent naissance à un joli imbroglio ou tout se mêle dans un joyeux bordel. Ainsi on assistera à des dialogues surréalistes entre ghost dog et andré, un marchand de glace français, sans qu'aucun ne se comprenne. On observera la nature du mot melting-pot, puisque l'on suit un afro-américain conditionné par la culture asiatique, ou encore des mafieux fans de rap ricain...
Le tout se déroulant sur un rythme plutot langoureux entrecoupé par des scènes fulgurantes. Les fans de Kitano seront ravis, pour autant le maître n'est jamais dépassé, enfin à mon sens !
Les références sont multiples, de Akira Kurosawa à Jean-pierre Melville, les influences de Jarmusch ressurgissent et crèvent littéralement l'écran.
Je finirais juste sur de mes scènes favories au début du film ou l'on voit Ghost Dog, sorte de Frankenstein lourd et disgracieux, marcher dans la rue et le rythme de ses pas est à l'unisson avec les samples de RZA producteur de la bande son. Joli glissement me permettant de vous parler du son qui dessert ce film à moins que ce ne soit l'inverse, on ne sait plus trop tellement la symbiose est efficace.
A priori ce n'est pas le premier genre musical auquel on aurait pensé pour napper ce film, mais Jarmusch assume et pousse à fond en confiant le projet musical à RZA, un des fondateurs du Wu-tang. Le flow est fluide et devient indissociable du film.
Le résultat est poétique, esthétique, tout fonctionne parfaitement, aucun cliquetis provenant des rouages, du plaisir intense, un film qui ne raconte pas seulement une histoire mais qui raconte l'histoire du cinéma !
Mikado
6 commentaires:
bon article !
Ghost Dog est aussi un film qui m'avait bien plu. ça fait plaisir de le retrouver si bien décrit! Par contre, tu sembles mitigé sur la bande originale? Pour moi, RZA est un champion en la matière. Et cette B.O. est la plus mémorable, elle m'a vraiment marqué. J'adoooore!!!!!!
Idem pour mois, la BO est mémorable. Concoctée par Rza dans sa période "5 years plan", elle nous transporte dans un univers crade et soulfull à la fois. Les u=invités sont triés sur le volet...
A écouter en tout cas !
Tu soignes bien tes p'tits articles Dokami et ça fait plaisir à voir. On sent que tu t'l'es bien bouffé jusqu'à la moelle ce p'tit Jarmush. Ai aussi accroché mais ai été moins convaincu que toi. Pour moi, soucis casting : ça passe moins bien si c'est pas des jaunes qd même...
Ouais ouais carrément la BO est excellente, y a pas de soucis. Pas du tout mitigé mon avis est aussi clair que le ciel californien!
J'ai peut etre pas assez insisté dessus désolé pour les aficionados du Wu-tang.
Concernant les jaunes mouais pas sur, laissons les "genres" à ceux qui savent se les approprier !
Moi, j'aime les styles déviants, le mélange des genres, les styles métissés. Le casting ne m'a pas posé de difficulté particulière. Mais c'est vrai que je ne suis pas sorti transcendé du film. Il manque un je ne sais quoi. Mais je ne pense pas que cela vienne du casting. Il faudrait que je le revoies.
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