10/02/2008

Blind Shaft

Publié par E. |


Blind Shaft est un film chinois de Li Yang (pour l'anecdote, le lien de l'auteur sur la fiche du film wikipedia renvoie à Li Yang, le sauteur à ski... Petite erreur...). Ce long-métrage sorti en 2003 avait allongé ma petite liste des "films à voir". D'où ce billet, qui ne s'explique pas seulement par le vide actuel des sorties cinéma.

Le synopsis de Blind Shaft pourrait vous gacher la surprise, ce qui explique ce spoiler...

Il n'est jamais assez tard pour lire le synopsis:


{Song Jinming et Tang Zhaoyang sont des arnaqueurs. Leur méthode est simple : repérer une personne seule qui cherche du travail, et l'engager pour travailler avec eux à la mine en se faisant passer pour un membre de la famille. Ensuite ils se débrouillent pour tuer le malheureux dans un quelconque éboulement et en touchent ensuite une prime de la part du directeur de la mine en échange de leur silence sur cet "accident". Un jour ils font la connaissance de Yuan, un jeune homme naïf mais attachant. Ils lui proposent un travail à la mine.}




Comme tout bon film asiatique, c'est l'authenticité de l'oeuvre qui marque dès les premières secondes. L'immersion est quasi-totale pour notre plus grand plaisir. L'équipe devant la caméra est saisissante. Le scénario, lui, est monté comme une fable sur les relations humaines. Très fin, parfois cynique et souvent amusant, il se focalise sur la vie d'hommes en proie au paupérisme, à l'image d'une Chine encore endormie, peut-être.

Dans ce défilé bestial, certains chassent et d'autres sont chassés.Tous sont ouvriers. De pénibles mineurs qui vivent sans eau ni électicité en plein hiver et ne voient pas la lumière du jour... Un tableau plutôt charbonneux... On se croirait parfois dans Germinal de Zola mais ici, ce n'est pas la mine qui est monstrueuse, c'est l'Homme.

En me lisant, vous pensez sans doute à l'un de ces films violents que seule l'Asie peut produire. Un genre de Visitor Q de la mine (idée à "creuser"...)? Il n'en est rien. En vérité, on suit un jeune travailleur de seize ans cherchant à financer ses études. Le rythme est assez lent (comme souvent avec les films asiatiques, même si les iraniens sont très forts là-dessus) mais on est vite confronté aux difficultés rencontrées par notre jeune homme, censé incarner l'innocence par son inexpérience et son non-savoir. Profondément naïf (tout ce qui fait un homme innocent, en somme), le personnage est vite manipulé par ses compères d'âges mûrs, chasseurs expérimentés.

Tout l'intérêt de cette fable repose sur un équilibre à trouver entre l'innocence, c'est-à-dire l'inexpérience ou la position de proie, et l'acquisition du savoir - qui peut mener à se défendre, donc à chasser. Vice ou vertue, que choisir? A l'inverse, a-t-on seulement le choix?
Ce jeune homme va devoir apprendre à partir de ce qui l'entoure pour sortir chaque jour de cette mine, pour en sortir vivant, pour s'en sortir dans la vie. Et dans ce combat, ses compagnons de route vont s'attacher à lui. Il va les rendre un peu plus humains. Comme on troque un peu d'innocence contre un peu de savoir...

Mais ces échanges qui bouleversent la donne suffiront-ils à trouver un équilibre? N'y aura-t-il pas un basculement vers l'inévitable? L'équilibre est-il seulement possible dans ce monde à l'atroce précarité? Comment ne pas envisager de se défendre lorsque l'on sait cette atrocité toute proche?
La réponse se fera en image depuis votre salon... Espérons-le!


E.



3 commentaires:

C. a dit…

Ce film est réellement très bon. A mettre dans le top 10 de films de niakweD de chine - ça pour sûr. Bien vu E. de ne pas l'avoir laissé sur le ro-K.

Des sensations !

Anonyme a dit…

bravo geniallissime cette critique
avec des renvois à chaque paragraphe permettant de ne pas oublier le reste des articles
vraiment bel exercice de style!

E. a dit…

merchi :) Pour les renvois, on va essayer d'en faire plus souvent (hein, les collègues?!) !

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